Ecoconception des services numériques : "un référentiel unique et robuste par la puissance publique"

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Jérémy PASTOURETJérémy PASTOURET

3 min

Ecoconception des services numériques : "un référentiel unique et robuste par la puissance publique"

Mai 2024 : un nouveau Référentiel général de l'écoconception des services numériques est rendu public. Entretien avec Sandrine Elmi Hersi, cheffe de l'unité "Internet ouvert" de l'Arcep (l'autorité notamment chargée de la régulation des communications électroniques) et pilote de ce référentiel.

Quelle est la place de ce nouveau référentiel face à l'ensemble des ressources existantes sur cette thématique ?

Le référentiel publié le 17 mai 2024 par l'Arcep et l'Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), en lien avec l'ADEME (Agence de la transition écologique), est le résultat de l'application de l'article 25 de la loi REEN*.

La loi REEN, entrée en vigueur le 15 novembre 2021, vise à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France.

Ce référentiel s'appuie sur la collaboration de la DINUM (Direction interministérielle du Numérique), l'INRIA (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique) et la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés), avec pour objectif d'établir un référentiel unique et robuste par la puissance publique. Ceci, afin d'éviter la multiplication de référentiels sur le même périmètre.

Sur la base des retours de la consultation publique sur un premier projet de référentiel [lancée le 9 octobre 2023], nous avons cherché à supprimer les redondances, regrouper des critères qui étaient proches et rendre les critères plus appréhendables et moins nombreux. Mais nous n'avons pas perdu en ambition ! A titre d'exemple, la partie IA subsiste et elle a été renforcée : deux critères sur l'IA ont été rajoutés dans la partie algorithmie.

Qu'est-ce que ce référentiel va changer dans la vie des citoyen·nes français·es ?

Le 1er objectif du référentiel est de concevoir des services numériques permettant d'allonger la durée de vie des terminaux. Si les concepteurs·rices de solutions numériques appliquent les critères du référentiel portant sur cette thématique, l'utilisateur·rice pourra utiliser une diversité de terminaux ainsi que des appareils anciens. Ceci réduit les incitations à acheter un appareil supplémentaire ou à renouveler les équipements.

Certains critères indiquent aux acteurs·rices du numérique la nécessité de mieux informer les utilisateurs·rices sur l'empreinte environnementale de leur service. Et leur permettre un meilleur contrôle de leurs usages numériques, en leur évitant les fonctionnalités au cœur de stratégies de captation de l'attention. Par exemple : l'affichage de contenu infini, les notifications intempestives... il y a également tout un volet autour de la transparence, y compris vers l'utilisateur·rice.

La déclaration d'écoconception : un moyen pour les usager·es de se faire une idée de l'impact écologique des services numériques ?

Dans le modèle de déclaration d'écoconception, nous avons prévu un espace "résumé" qui permettra aux utilisateurs·rices finaux·ales, mais aussi aux utilisateurs·rices professionnel·les, de s'assurer de la prise en compte des enjeux environnementaux des services qu'ils·elles conçoivent et / ou consomment. Avec cette version finalisée, la déclaration d’écoconception sera un moyen plus standardisé de récolter ces informations.

Par exemple, les autorités publiques sont aussi des utilisatrices de services numérique. De plus en plus d'administrations demandent aux entreprises qui leur fournissent des services numériques de respecter les critères du RGESN.

Ce référentiel s'adresse à "tous les métiers liés de près ou de loin à la conception d’un service numérique". Comment un tel document peut-il les responsabiliser ?

Si vous regardez les fiches pratiques du référentiel, vous verrez qu'il y a une diversité de types de métiers pouvant être concernés. De ce fait, le référentiel peut participer à les responsabiliser.

Nous allons aussi nous en servir comme un levier pour responsabiliser les plus grand·es acteurs·rices du numérique et obtenir un effet d’entraînement afin de toucher tous·tes les professionnel·les du numérique, du moins tous·tes celles·eux impliqué·es en matière de numérique soutenable.

Au delà de l'Arcep, dans toutes les administrations, nous avons un levier supplémentaire : la commande publique, qui peut avoir un effet multiplicateur. Non seulement elle permet de promouvoir l'écoconception des services publics, mais cela provoque un effet d'entraînement puisqu'elle concerne aussi les prestataires qui fournissent des services numériques à l'État.

Ce référentiel est également disponible en anglais. Cela permet aux équipes transnationales d'avoir un document facilement diffusable et appréhendable dans l'ensemble d'une organisation. Enfin, ce document peut constituer un support de sensibilisation et de formation des futur·es professionnel·les du numérique.

Ce référentiel a-t-il vocation à être diffusé plus largement qu'en France ?

Notre objectif quant à la diffusion du référentiel, c'est sa promotion au niveau européen. En tout cas, nous allons le promouvoir auprès de nos homologues, auprès des institutions européennes et des acteurs·rices internationaux·ales.

La Commission Européenne a publié un livre blanc il y a quelques semaines : elle y indique qu'elle souhaite travailler pour son prochain mandat sur la responsabilisation environnementale des fournisseurs de contenus et d'applications. Toutes les recommandations du RGESN seraient intéressantes à considérer pour nourrir les travaux notamment des co-législateurs européens (la Commission européenne et le Parlement européen).

Références :

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