Nos smartphones méritent mieux qu'une retraite anticipée

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Tiphaine PABOUTiphaine PABOU

3 min

Nos smartphones méritent mieux qu'une retraite anticipée

L'utilisation brève et massive des smartphones en France est devenue une réalité indiscutable, mais les conséquences environnementales et sociales de cette tendance sont souvent méconnues. Conservez plus longtemps vos appareils pour réduire leur empreinte carbone et préserver les ressources naturelles.

D'après l'ADEME, un·e français·e sur deux consulte son smartphone intensément (toutes les 10 minutes), dès le réveil pour 61% d'entre nous... et même aux toilettes pour 46%.

84% des Français·es de plus de 12 ans possèdent un smartphone

et ils·elles commencent à l'utiliser dès l'âge de 9,9 ans en moyenne.

Source : ADEME

Les smartphones accumulent les fonctionnalités : communication (messages, appels, réseaux sociaux), accès à l'information, musique, photographie et bien plus encore. Ce qui les rend difficiles à mettre de côté. Pourtant, quand il s'agit de les remplacer par un modèle plus récent, la plupart d'entre nous hésitent moins.

62% des appareils remplacés fonctionnent encore

et 84% des smartphones en circulation ont moins de 3 ans.

Source : ADEME

Le renouvellement fréquent des smartphones a un impact environnemental important. Mais il n'est pas trop tard pour agir : la conservation de nos smartphones actuels offre une solution prometteuse pour réduire notre empreinte carbone.

L'impact environnemental des smartphones

L'impact des smartphones sur l'environnement provient majoritairement de leur fabrication, qui représente environ 78% de leur empreinte écologique. L'utilisation quotidienne des smartphones contribue seulement à hauteur de 1,3% de cette empreinte.

La composition d'un smartphone est complexe, avec environ 70 matériaux et 50 métaux différents, soit deux fois plus que dans un téléphone classique. Ces appareils sont constitués à 55% de métaux précieux comme l'or, l'argent et le tantale, à 35% de plastiques et à 10% de verre et de céramique.

Une extraction des métaux lourde de conséquences

Avant d'être assemblés, les composants d'un smartphone voyagent énormément. Les métaux utilisés dans ces appareils proviennent principalement de mines situées dans des pays comme la Chine, la République Démocratique du Congo, l'Amérique du Nord, le Mexique, la Russie, l'Inde et l'Australie.

L'extraction de ces métaux entraîne une importante dégradation environnementale, notamment à cause de la destruction des habitats naturels, de la pollution de l'eau et du sol, et de l'émission de gaz à effet de serre. Le processus de raffinage et de transformation de ces métaux est énergivore et contribue également à la pollution atmosphérique.

1 tonne de déchets radioactifs et 75000 m3 d'eau acide

environ sont causés par l'extraction d'1 tonne de métaux rares en Chine.

Source : ADEME

Un impact social important

Cette extraction est également associée à des conditions de travail dangereuses, précaires et à l'exploitation d'enfants, notamment dans des régions comme la République Démocratique du Congo.

La loi Dodd-Frank de 2010 aux États-Unis vise à prévenir le financement de conflits armés en obligeant les fabricants américains cotés en bourse à identifier et signaler l'utilisation de certains minerais provenant de la RDC et de pays voisins. Cependant, les conditions d'approvisionnement restent souvent peu transparentes.

De plus, l'impact environnemental de l'extraction, tel que la pollution et la déforestation, affecte gravement les communautés locales, compromettant leurs moyens de subsistance et leur bien-être.

Un recyclage encore complexe

Le recyclage des smartphones est compliqué. Seulement une vingtaine de métaux parmi les 50 présents dans un smartphone peuvent actuellement être recyclés. En partie parce que les minerais ne sont pas utilisés tels quels mais sous forme d'alliages, ce qui rend leur recyclage difficile.

D'autre part, les composants des smartphones sont petits et souvent assemblés de manière compacte, ce qui rend leur séparation pour le recyclage compliquée.

Ces appareils contiennent également des matériaux potentiellement toxiques, comme les batteries au lithium, qui nécessitent des méthodes de traitement spécialisées pour être recyclés de manière sûre et efficace.

Les avantages de la conservation des smartphones

Prolonger la durée de vie de votre smartphone en l'utilisant 4 ans au lieu de 2 ans a un impact positif sur l'environnement. Cela équivaut à économiser l'émission de 30,93 kg de CO2, soit environ 38 fois le trajet en TGV de Nantes à Paris.

La majorité de l'empreinte carbone des smartphones provient de leur fabrication. En conservant un smartphone plus longtemps, on réduit la production de nouveaux appareils, ce qui diminue la quantité de déchets électroniques et évite la libération de substances toxiques dans l'environnement.

De plus, en prolongeant la vie de nos smartphones, nous réduisons la demande de nouvelles ressources, telles que les métaux rares et précieux nécessaires à leur fabrication. Cela contribue à la préservation des écosystèmes affectés par l'extraction minière.

Enfin, au-delà de la production, la conservation des smartphones permet également d'économiser l'empreinte carbone associée au transport et à la distribution de nouveaux appareils.

Si les smartphones sont désormais incontournables dans notre quotidien, il est essentiel de prendre conscience de leur impact sur l'environnement et la société. La courte durée de vie de ces appareils et leur cycle de remplacement rapide contribuent à la détérioration de notre planète. Cependant, en prolongeant l'utilisation de nos smartphones actuels, il est possible de réduire significativement notre empreinte carbone, préserver les écosystèmes fragiles et promouvoir des pratiques de fabrication plus responsables. Il est temps de repenser notre relation avec la technologie pour un avenir plus durable.

Références :

[Photo de couverture : Agê Barros]

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