Coup de foudre sur un écran : peut-on encore s'aimer sans swiper ?
S’inscrire sur une application ou un site de rencontre : étape incontournable pour trouver l'amour de nos jours ? Le fait est qu'à l'heure actuelle, ces plateformes digitales rencontrent un grand succès auprès des femmes et hommes en quête de relations. Elles se trouvent pourtant au cœur de nombreux débats.
Généralisation des nouveaux modes de rencontre
Pas moins d'1 français·e sur 4 déclare s’être inscrit·e au moins une fois sur un site ou une application de rencontre (Sondage IFOP, 2018).
22% des français·es
en couple depuis moins d’un an affirment avoir rencontré leur partenaire via une application de rencontre.
Source : Statista
L’essor de la fréquentation des plateformes de dating s’explique notamment par la démocratisation de leur clientèle, avec une représentation de plus en plus équilibrée des différentes catégories sociales. Autrefois dédiées à une élite, ces plateformes attirent désormais autant les classes populaires que les cadres. Une conséquence de la généralisation de l'accès aux outils numériques à toutes les couches de la société.
Qu’est-ce qui pousse les français·es à recourir aux applications de rencontre ?
Les applications de rencontre sont conçues pour attirer de nouveaux·elles utilisateurs·rices. Elles sont simples à utiliser, possèdent des interfaces intuitives et ont la capacité de mettre en relation des personnes théoriquement « compatibles » rapidement, n’importe où et à tout moment - tant que l’on dispose d’une connexion internet.
Plus le temps passe, plus les plateformes offrent une diversité importante en termes de profils, d'intérêts, de traits de personnalité, etc. Cela permet aux utilisateurs·rices de choisir des partenaires potentiel·les correspondant à leurs critères, parfois très spécifiques. Il s’agit d’une opportunité de rencontrer de nouveaux individus en dehors de son cercle social habituel. Un bénéfice certain pour celles·eux sous la contrainte d'horaires chargés. Ou pour les personnes résidant dans des zones géographiques limitant les opportunités de rencontre.
Les sites de rencontre permettraient aux utilisateurs·rices d'économiser du temps dans leur recherche du partenaire idéal. Le tri des profils, filtrés en amont à partir des critères sélectionnés, réduirait le temps passé à rencontrer des personnes. Un nombre croissant d'utilisateurs·rices délaissent ainsi progressivement les approches plus "traditionnelles" pour se tourner vers ces services de rencontre en ligne.


Pour parvenir à déceler des profils compatibles, de nombreux sites de rencontre utilisent des questionnaires et des algorithmes. L'objectif : faire correspondre les individus en fonction de leurs affinités, de leurs intérêts communs et de leurs valeurs. Les outils digitaux fournissent ainsi une chance supplémentaire de réunir des partenaires compatibles sur différents aspects.
Progressivement, l'industrie des applications de rencontre a élargi son marché et par la même occasion, sa cible. Au lieu de viser simplement les adultes, ces plateformes tentent désormais de toucher un public plus vaste.
Ceci soulève toutefois des questions d'éthique, notamment lorsque les profils correspondent à des utilisateurs·rices mineur·es comme majeur·es. La polémique autour de l'application de rencontre Crush, destinée aux 10-21 ans, a récemment attiré l'attention des législateurs sur cette problématique.
D’indéniables défis pour les applications de rencontres
44% des utilisateurs·rices français·es
se déclarent insatisfaits de leur expérience sur ce type de plateforme.
Source : Sondage de l'institut Cluster 17
Difficile de le nier : l'expérience utilisateur·rice demeure un défi majeur pour l'industrie des rencontres en ligne, alors que de plus en plus de personnes recherchent l'amour et la connexion à travers les écrans.
Premier défi à relever : la protection des données. D’autant plus que les applications de rencontre collectent et stockent un ensemble d’informations sensibles sur leurs utilisateurs·rices. Ceci les rend potentiellement vulnérables aux violations de données et aux cyberattaques. Les fuites de données ne sont d'ailleurs pas rares et s'avèrent dangereuses pour la sécurité des utilisateurs·rices, compte tenu de la sensibilité des informations personnelles renseignées sur les plateformes. Un exemple resté dans les mémoires : le piratage du site de rencontres Ashley Madison en 2015, avec pas moins de 33 millions de comptes exposés.



Par ailleurs, les escroqueries en ligne et comportements malveillants demeurent fréquents. La présence de faux-profils est presque devenue banale : certains individus prennent virtuellement les traits d'un autre (plus jeune ou plus âgé, de l'autre sexe etc.) à des fins malveillantes et de manipulation.
Autant de menaces qui compromettent l'expérience des utilisateurs·rices et remettent en cause la confiance accordée aux sites de rencontre. Une menace qui demeure néanmoins particulièrement difficile à prévenir et réguler pour les concepteurs, obligeant les utilisateurs·rices à rester vigilant·es.



Une expérience globalement mitigée pour les utilisateurs·rices
Tandis que certain·es s'enthousiasment des possibilités offertes par les applications de rencontre, d'autres découvrent une réalité parfois décevante. De nombreux arguments reviennent, comme le manque d’authenticité des relations établies par écrans, peinant finalement à se concrétiser au-delà du virtuel.
Certains dénoncent également le manque de bienveillance des algorithmes mis en place par les applications de rencontre, donnant davantage de chances aux femmes qu’aux hommes de « matcher ». Dans une enquête publiée en 2019, Le Monde révélait par exemple que le taux de succès d'une femme sur un match est en moyenne de 50% sur Tinder... contre 2% pour un homme.
Autre problème soulevé par les (ex-)utilisateurs·rices : le manque de régulation effectué par les plateformes, favorisant l'apparition de faux-profils et la diffusion de contenus compromettants. La multiplication des profils, provoquant une saturation des plateformes, intensifie d'ailleurs ce phénomène. Finalement, certain·es utilisateurs·rices témoignent d'un effet "catalogue" qui déshumanise les rencontres.
Addiction, remise en question de l’efficacité des plateformes de rencontre, discrimination et sexisme sont également pointés du doigt :
- 1 utilisateur·rice sur 6 (16%) admet avoir déjà eu l’impression d’avoir développé une addiction aux applications de rencontre.
- 2 femmes sur 3 ayant utilisé les applications de rencontre disent avoir été harcelées sur ces plateformes.
Au bout du compte, un nombre non négligeable de personnes décident de renoncer aux applications de rencontre et de renouer avec le "monde réel". Car même en version digitale, le chemin est tortueux pour parvenir à créer une véritable relation avec quelqu’un. Dédier du temps à la recherche du partenaire, faire transparaître une bonne image de soi, initier et maintenir une conversation pour enfin, peut-être, espérer décrocher un rendez-vous… ce n'est pas un hasard si la presse anglo-saxonne a créé une expression pour qualifier ce sentiment d’épuisement : le « dating burn-out ».
Références :
- Statista - Répartition des lieux de rencontre des Français en couple depuis moins d'un an en 2021
- IFOP - Observatoire 2018 de la rencontre en ligne
- France Inter - Ce que les applications de rencontre changent à nos vies
- France Inter - "C'est complètement malsain" : enquête sur ces jeunes qui quittent les applis de rencontre
- Le Point - Désillusion, malentendus, échecs… La fin des applications de rencontre ?
- Le Monde - Quel est le but des applications de rencontre ?
- Le Mouv' - La polémique "Crush" et la délicate question de la protection des réseaux sociaux
- LINC - Apps de rencontre et données personnelles : « c’est un match ! »
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