Un film, une exposition et un essai : nos recommandations culturelles numériques du mois de septembre

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Valentin ChomienneValentin Chomienne

6 min

Un film, une exposition et un essai : nos recommandations culturelles numériques du mois de septembre

Pour la première fois, Les e-novateurs lancent leurs recommandations culturelles numériques. Au programme ce mois-ci : le film Dalloway de Yann Gozlan, Cyberpunk, le nouvel essai d'Asma Mhalla, et une exposition proposée gratuitement en ligne par le Jeu de Paume.

Le numérique est devenu, au cours de ce premier quart de XXIème siècle, l’un des sujets principaux pour les artistes. Les séries, romans, pièces de théâtres... s’y intéressant se multiplient. Afin d’y voir un peu plus clair dans cette production très conséquente, Les e-novateurs lancent, en ce mois de septembre 2025, leurs recommandations culturelles. Au menu de cette première volée : le film Dalloway de Yann Gozlan, le parcours artistique en ligne Digital Raubkunst (Rose) d’Aurélien Bambagioni et le livre Cyberpunk d’Asma Mhalla.

Le film : Dalloway de Yann Gozlan (sorti au cinéma le 17 septembre 2025)

quand commence la paranoIA ? - Dalloway / Cécile de France
Affiche du Film Dalloway (Gaumont)

Comme l’époque du long-métrage Her de Spike Jonze, avec Joaquin Phoenix et Scarlett Johansson, semble ancienne. Sorti en 2013, le film montrait un habitant de Los Angeles s’éprenant d’un programme informatique ultramoderne. Douze ans après, les intelligences artificielles se sont imposées dans les foyers de centaines de millions d’humain·es et la possibilité de relationner avec elles ne questionne plus autant, voire plus du tout. C'est dans ce contexte que le film Dalloway (de Yann Gozlan) a très logiquement vu le jour.

Ce thriller d’environ deux heures, porté notamment par Cécile de France et Mylène Farmer, noue son intrigue dans une prestigieuse résidence d’artistes, très en pointe en matière de technologie. Clarissa, une romancière peu inspirée, y échange avec Dalloway, une intelligence artificielle, et trouve en elle une aide à la création et même un soutien psychologique. Les tensions lancinantes inhérentes au film proviennent de l’intrusion de plus en plus importante de cette assistante virtuelle dans l’intimité de l’héroïne…

L'exposition : Digital Raubkunst (Rose) d’Aurélien Bambagioni (17 septembre 2025 - 31 janvier 2026)

Capure d'écran de l'exposition en ligne Digital Raubkunst (Rose) proposée par le Jeu de Paume

Je trouvais que cela avait du sens d’émettre un parallèle entre les gestes historiques de spoliation d’œuvres d’art perpétrés par les nazis lors de la Seconde Guerre mondiale et ceux que l’on peut avoir avec les intelligences artificielles, notamment en matière de droits d’auteur.

Aurélien Bambagioni

L’artiste Aurélien Bambagioni, basé à Paris et sur l’île de Groix au large du Morbihan, mène une réflexion audacieuse avec son Digital Raubkunst (Rose), présenté sur le Web depuis le mercredi 17 septembre 2025 et jusqu’au 31 janvier 2026.

Cette création en ligne, portée par le Jeu de Paume (un important centre d’art parisien), invite ses visiteurs·ses et ses expérimentateurs·rices à découvrir aléatoirement des œuvres conçues avec l'IA à partir de supports réellement spoliés par les nazis. Le tout en étant guidé·es par une espèce de spectre de Rose Valland, conservatrice et résistante contre l’occupant allemand. « J’ai utilisé des IA génératives pour modéliser sa voix, par exemple, explique Aurélien Bambagioni. HeyGen, un outil de génération d'avatars virtuels, m’a ainsi servi à la synthétiser, à partir de documents radiophoniques samplés et nettoyés. »

Les curieux·ses se retrouvent donc projeté·es dans les salles du Jeu de Paume au cours des années 1940, de jour comme de nuit (selon leur heure de connexion). Ils·elles prennent part à une sorte de voyage dans le temps conduits par les IA génératives (ChatGPT, Runway, Claude…). Deux ans après la parution de son film L’Île artificielle (2023), déjà composé grâce à de tels outils, Aurélien Bambagioni s’affirme comme l’un des fers de lance de cette avant-garde artistique.

Le livre : Cyberpunk d’Asma Mhalla (sorti en librairie le 19 septembre 2025)

Cyberpunk, le nouveau système totalitaire > Asma Mhalla après technopolitique, le technofascime ?
Couverture du livre Cyberpunk (Le Seuil)

Le Système totalitaire, publié au début des années 1950, clôt l'ensemble de trois écrits d'Hannah Arendt intitulés Les Origines du totalitarisme. L’étude de la philosophe allemande sur l’Allemagne hitlérienne et la Russie stalinienne a fait école. Sept décennies plus tard, l’autrice et politologue Asma Mhalla s’inscrit dans les pas de son illustre prédécesseure avec la parution, vendredi 19 septembre 2025, de son nouveau livre Cyberpunk - Le nouveau système totalitaire, aux éditions du Seuil.

« Le XXIème siècle ne vous gouvernera pas, il vous programmera. » Dès les premiers mots, l’essayiste frappe fort. Asma Mhalla observe finement les mouvements politiques portés par les géants du numériques, avec évidemment un regard très appuyé sur les États-Unis. Pour l’écrivaine, « le logiciel totalitaire a muté, il circule désormais dans les réseaux synthétiques ». Son texte ne se veut pas comme un état des lieux universitaire des techno-autoritarismes, et prend plutôt la forme d’un regard aiguisé.

À la lecture de Cyberpunk, on peut être pris de vertige. D’abord parce que « pour notre époque, l’équation à résoudre est de nature technopolitique », comme le présente Asma Mhalla : elle dépasse donc très largement l’horizon d’action immédiat des lecteurs·rices. Ensuite car « nos existences se sont dédoublées : chacun jouit désormais de deux canaux de vie parallèles », à savoir le réel et le virtuel. Le nouveau totalitarisme pointé par l’autrice transite ainsi par les connexions les plus intimes de tous·tes... devenant d’autant plus difficile à juguler.

Références :

[Photo de couverture : Capure d'écran de l'exposition en ligne Digital Raubkunst (Rose) proposée par le Jeu de Paume]

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